IFB 2017 : Gideon/Sukamuljo, des ''minions'' taille XL

Publiée par Terence Mahé le mercredi 18 octobre 2017 à 12:22
GideonSukamuljo
Crédit photo : Yonex international

L’édition 2017 des internationaux de France de Badminton est sur le point de commencer (24-29 Octobre). À son avantage : un panel de stars quasi au complet, condensant dans la petite arène les badistes rois depuis quelques mois, ou depuis plusieurs années. Parmi eux, l’une des paires de double hommes qui détonne depuis plus d'un an : les Indonésiens Gideon/Sukamuljo. Auteur d’une belle razzia sur les titres Super Series, l’atypique paire indonésienne impressionne autant qu’elle agace sur le circuit.

Marcus Fernaldi Gideon, un nom connu du public de Coubertin

Le nom de Marcus Fernaldi Gideon est tout sauf étranger au Hall of Fame du Super Series français. En effet, il a eu l’occasion d’y briller lors de l’édition 2013 avec un certain Markis Kido (champion du monde 2007 et champion olympique 2008).

Auteurs d’un tournoi exceptionnel, débuté pourtant par les tours qualificatifs le mardi avant de s'achever sur une victoire le dimanche, la paire avait surpris tout les observateurs, ainsi que les Malaisiens Koo/Tan en finale. Un premier titre majeur pour Gideon, talentueux mais souvent dans l’ombre d’autres paires indonésiennes alors au firmament, comme Ahsan/Setiawan ou Pratama/Saputra. Extrêmement discret sur la scène internationale pendant près de deux ans, le pensionnaire du PB Jaya Raya, hors du circuit fédéral national, n’avait alors pas les mêmes facilités pour arranger son parcours sportif.

Mais les IFB 2013 resteront pourtant l’acte fondateur du changement de carrière du premier des ''Minion'' (un surnom donné par les fans indonésiens sur les réseaux sociaux, en référence aux petits monstres jaunes du film d’animation Moi Moche et méchant). Un point d’orgue suffisant pour lui permettre, à la retraite internationale de Kido, d’intégrer la PBSI, avec le succès qu’on lui connaît.

Aujourd’hui âgé de 26 ans, du ''haut'' de son mètre 67, le natif de Jakarta a donc pris son temps pour confirmer. De cette paire, Fernaldi Gideon représente la relative sagesse. Bien que très expressif sur le court, son calme olympien et son caractère respectueux apporte de la stabilité au duo. Il est celui qui peut canaliser son fougueux partenaire, afin de maintenir le duo à son potentiel maximum sur un court.

Côté jeu, son style a considérablement évolué depuis 2013. Si lors de partenariat avec Markis Kido à Coubertin, son domaine de prédilection était le contrôle au filet (qui oserait envoyer Kido le cogneur jouer en finesse au filet !), il s’est depuis transformé en attaquant imprévisible et créatif. Son panel offensif s’est considérablement développé, bénéficiant de son expérience de stratège du mi-court pour créer des décalages meurtriers, compensant petite taille par grande agilité tactique et technique.

Mais même avec la meilleure qualité d’adaptation au monde, le natif de Jakarta n’aurait pas pu y arriver seul. Car l’apport du jjoyau Kevin Sanjaya Sukamuljo n’est pas étranger à l’explosion de la petite pile électrique.

GideonSukamuljo
Crédit photo : Yonex international

Kevin Sanjaya Sukamuljo, qui s'y frotte s'y pique !

Seulement 21 ans, 1m70, et un aspect plutôt maigrichon  : le second ‘’minion’’ Kevin Sanjaya Sukamuljo ne paie pas de mine par rapport au gabarit classique du spécialiste de double hommes. Mais l’habit ne fait pas le moine ! Malgré son jeune âge, il est sans doute l’un des dignes successeurs d’Hendra Setiawan, l’un des plus grands noms du badminton indonésien. Le sang chaud en plus !

Car son tempérament de feu (voir excessif pour certains) est aussi gravé dans son ADN qu'une vista exceptionnelle, et une technique au dessus du lot, dans la lignée de son glorieux aîné. Le natif de Banyuwangi fait déjà partie des grands, peut-être même le meilleur actuellement dans ce secteur.

Mais malgré tout ce talent, le diamant Sukamuljo n’a brillé qu’épisodiquement lors de ses jeunes années. Pas de titre de champion du monde junior, mais tout de même une médaille d’argent en mixte lors de l’édition 2013. Côté double hommes, il a tout de même obtenu deux médailles de bronze aux championnats d’Asie jeunes en 2012 et 2013, souvent plus relevés que les mondiaux espoirs.

De bons résultats, suivis par un an et demi d’apprentissage chez les seniors avec son premier acolyte Selvanus Geh, loin des spotlights. Jusqu’au début de son partenariat avec Marcus Fernaldi Gideon en 2015. La similitude de profils et de parcours entre les deux joueurs (tout sauf une coïncidence) permet un décollage rapide de l‘attelage.

GideonSukamuljo
Crédit photo : Yonex international

2017 : l’année de la consécration

En un an Fernaldi/Sukamuljo se montrent très rapidement dangereux. Premières finales en Grand Prix Gold, premiers coups d’éclat : les Indonésiens entrent dans la danse dans un timing parfait pour tenter la qualification olympique. Ils perdent toutefois dans cette course face aux plus expérimentés Pratama/Suwardi, après un duel harrassant d'un an. Une déception pour le jeune duo, mais le meilleur reste à venir.

Car en 2016, le nom du tandem Gideon/Sukamuljo est sur toutes les lèvres, après 3 Super Series remportés sur l’année : en Inde, en Australie et en Chine. En un an, il réalise une ascension fulgurante, passant de la 182ème place en Mars 2015 à la 16ème place en Mars 2016. Le décollage d’une fusée dont la mise en orbite était devenue inévitable après la séparation d’Ahsan et Setiawan.

Le décor était planté pour offrir une grande année 2017 aux ‘’minions’’, qui règnent désormais sur la PBSI. Et quoi de mieux que de remporter le prestigieux All England, le graal de tout badiste pour imposer sa suprématie ? Nombreux ont été les prétendants prestigieux à ce trophée à avoir échoué. Mais en 5 jours, les Indonésiens ne concèdent qu’un seul set en demi-finale avant de s’imposer avec autorité. Ils deviennent les premiers indonésiens depuis Gunawan/Heryanto (2001) à triompher en terre britannique.

Les prémices à une superbe saison, puisqu'ils ont ensuite enchaîné avec l’Inde et la Malaisie, leur permettant par la même occasion d’accéder au rang de nouveaux numéros 1 mondiaux. Intouchables durant tout le printemps, leur série s’arrête pourtant à Singapour, en demi-finale face aux fantasques danois Boe/Mogensen, leurs grands rivaux du moment. Ces derniers mettent fin à une incroyable série de 19 victoires de rang. Le début d’une période plus difficile, marquée par une défaite prématurée à l’open d’Indonésie à domicile face à Astrup/Rasmussen, et surtout un échec en quart de finale des mondiaux de Glasgow face aux Chinois Chai/Hong.

Le déclic pour remettre de l’ordre dans leur jeu. Battus en finale en Corée du Sud par Boe/Mogensen (encore eux), ils prennent leur revanche la semaine suivante au Japon, terrassant enfin en demi-finale les vétérans scandinaves pour conquérir leur quatrième trophée Super Series de la saison (soit près de la moitié des étapes disputées !).

Une marque qui pourrait encore être améliorée dès cette semaine au Denmark Open. Et pourquoi pas un doublé à Paris ? Dès le mercredi 25 octobre, les ‘’minions’’ débarquent à Coubertin, prêt à faire vibrer le public par leur style étonnant et leurs facéties. Car le duo laisse en effet rarement indifférent.

Une paire qui marque les esprits et divise les opinions

Sous le feu des projecteurs depuis 2 ans, la paire de poche fait autant parler d’elle par le fond que par la forme. Car si Marcus Fernaldi Gideon est reconnu pour son humilité et son caractère très respectueux sur le terrain, Kevin Sanjaya Sukamuljo n’a lui au contraire pas tardé à faire des vagues.

Le cadet des deux indonésiens (et sans doute le plus talentueux) fait surtout office de tête brûlée . Tantôt chambreur, feintant souvent de frapper le volant lorsque celui-ci sort du terrain, tantôt provocateur dans son attitude envers ses adversaires derrière le filet, ne s’excusant que très peu sur des attaques au corps, le retors indonésien aime faire dégoupiller ses rivaux.

Résultats : plusieurs accrocs qui lui confèrent une mauvaise réputation, parfois avec plusieurs incidents dans le même match face à des top players. L’exemple du Danois Mads Conrad-Petersen, très remonté après le fougueux indonésien après sa défaite en demie-finale de l’India Open 2017 symbolise bien cette tendance. C’est le coach indonésien qui est venu apaiser les ardeurs du scandinave, particulièrement irrité par le tempérament de Sukamuljo.

Avec un tel comportement, les joueurs peuvent aussi refuser de lui serrer la main, l’année dernière c’est le Malaisien Tan Wee Kiong qui a très mal digéré sa défaite en demi-finale en Inde. Le litige venant d’un désaccord sur le changement de volant à la fin du second set. Même leurs compatriotes Pratama/Suwardi ont manqué d’en venir aux mains avec leur partenaire d’entraînement à l’issue d’une houleuse finale perdue en Inde toujours (2016).

Service compris pour les Indonésiens

Outre un comportement parfois borderline de Kevin Sanjaya Sukamuljo, la paire indonésienne a aussi fait parlé d’elle pour un sujet tout autre. Ne dépassant pas le mètre 70 et à priori souvent désavantagés par rapport à des adversaires de grande envergure (Mads Pieter Kolding fait 2,03 mètres à titre de comparaison), les ‘’minions’’ ont adapté leur service à leur petite taille, frôlant – ou dépassant – les limites de la réglementation en vigueur, tout particulièrement sur les services longs.

De quoi faire casser une raquette de frustration à Zhang Nan, pourtant pas le plus nerveux sur le court, après un désaccord avec l’arbitre à ce sujet. Une situation qui a poussé la BWF a couper court au débat : en 2018, une hauteur maximale de 1.10 mètres devra être respectée pour un service court. Auparavant, la règle du service stipulait qu’il devait être effectué sous la première côte flottante. Une réglementation qui va en faveur des joueurs de petites tailles, mais sur laquelle des géants comme Viktor Axelsen et Mads Pieler-Kolding ont déjà pesté.

En bien des aspects, la paire phare de cette année 2017 sait faire parler d’elle. On aime ou on déteste, mais cette capacité à faire le show place les ‘’minions’’ au centre de toutes les attentions. Et nulle doute que Coubertin y sera sensible la semaine prochaine. À la vue de leur palmarès déjà conséquent, il ne leur reste en tout cas plus qu’à concrétiser dans les compétitions suprêmes pour faire aussi bien, voir mieux, que leurs mentors spirituels Hendra Setiawan, Markis Kido ou Muhammad Ahsan. Et faire taire définitivement les critiques !

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