Crédit photo : Badmania.fr
"Il faut juste profiter du moment"
Tu jouais encore récemment avec Ronan Labar, puis avec Gaëtan Mittelheiser avant sa blessure. Tu joues en ce moment avec le Hollandais Ruben Jille. Ces changements de partenaires ne sont pas trop perturbant pour toi ?Et à plus court terme, quels sont tes objectifs ?
C'est perturbant dans le sens où tu n'as pas trop le temps de mettre des choses en place, mais c'est également intéressant d'apprendre à s 'adapter à chaque jeu ! Il y a une partie frustrante à accepter, mais cela me permet de m'ouvrir un peu plus et de progresser sur des endroits ou j'ai quelques faiblesses. Il faut quand même un temps d'adaptation, en plus je suis gauchère, donc c'est particulier.
Tu as plus de stabilité en double dames où tu joues depuis un petit moment avec Anne Tran. On sent qu'il ne vous manque pas grand chose pour accrocher des grosses paires, comme aux mondiaux ou aux IFB 2016 par exemple ...
Un petit truc en effet, je pense qu'on a bien progressé l'année dernière donc on a des attentes plus importantes. Ces derniers mois, on fait des bons matchs mais ça ne passe pas. Il nous faudrait une sorte de match référence, qui nous permettrais de passer à l'étape supérieure et de prendre confiance. On se remet beaucoup en question, donc on a besoin d'avoir cette stabilité, une certaine confiance en soi, et en ce moment ça manque un peu.
On fait une petite contre-performance en Belgique après les mondiaux, cette semaine ( au Dutch Open, ndlr) on n'a pas très bien joué mais c’était déjà mieux. On est dans une période où il y a beaucoup de changements dans notre paire, des choses qu'on essaie d'ajuster pour qu'on puisse passer cette étape. Il faut accepter de faire quelques tournois avec des objectifs de mise en place !
Est ce que tu t'attends au même genre de match au premier tour des IFB cette année ? (contre Poon/Tse ndlr)
On ne sera sûrement pas leaders dans le match, il va falloir qu'on se libère. Mais j'aime beaucoup les IFB, j'adore l'ambiance qu'il y a, et ça me permet justement de me libérer, beaucoup plus que sur un autre tournoi ! j'adore l’atmosphère qu'il y a, et je pense que ça nous aidera à aller chercher cette petite chose qui permette de passer à l’étape supérieure, et d'avoir un peu plus de confiance dans notre jeu par rapport à ces derniers temps.
Les IFB sont forcément quelque chose de spécial pour tout badiste français. Est ce que ça t'apporte un regain de confiance, ou au contraire une pression supplémentaire ?
Pendant des années j'ai eu beaucoup de pression, j'avais du mal à me libérer. Finalement avec le temps, j'ai réussi à prendre ces événements là comme un cadeau, puisque l'on joue chez soi. Il faut utiliser le public en notre faveur, il ne faut pas que ça nous mette la pression. Souvent nos amis et notre famille viennent, et c'est vrai qu'ils sont là pour passer un bon moment, de toute façon on sait qu'ils seront fiers de nous quoi qu'il arrive. Il faut juste profiter du moment et se faire plaisir. Mais c'est vrai qu'il y a toujours des petits frissons au moment de rentrer dans Coubertin !
Crédit photo : Aurélie Millauriaux
''Je n'ai pas envie d'endosser le rôle de maman !''
Tu fais partie des joueuses qui ont le plus d'expérience au sein de l'équipe de France. Est-ce que ça te donne un rôle particulier auprès des autres joueuses comme ta partenaire Anne Tran où la paire Delrue/Palermo ?
Je ne me considère pas comme la doyenne, je dois faire de mon mieux pour que l'esprit d'équipe perdure au sein du groupe. Si elles ont besoin de moi elles savent que je suis là, mais je n'ai pas envie d'endosser le rôle de maman ou de grande s½ur trop souvent ! Elles sont grandes aussi, et elles se font leur propre expérience sur les tournois.
Il y a bien sur des écarts de génération, j'ai par exemple dix ans d'écart avec Delphine (Delrue, ndlr) et Thom (Gicquel) mais nous avons un groupe qui s'entend très bien. On a le même état d'esprit vis à vis de la compétition, sur le terrain, comme à l’entraînement. Ils ont une maturité à leur age vis à vis de l’entraînement qui est très positive. Je pense que les coachs font en sorte que cet état d'esprit perdure longtemps, pour qu'on ne soit pas là pour se bouffer les uns les autres, mais plus dans l'idée de s'entraider.
Tu parlais du staff, quelle est ta relation avec Peter Gade ? Que peut t-il t'apporter selon toi ?
Même si je travaille plus avec Jesper Hovgaard, qui est mon référent, Peter m'apporte des choses. On a trouvé un bon relationnel,il n'y a pas trop de conflit. Il est spécial, il a sa culture du badminton et je la respecte tout à fait, j’essaye vraiment de prendre le positif de ce qu'il peut m'apporter et de discuter avec lui. Il considère que la relation entraîneur/entraîné est quelque chose de très important, et j'apprécie ce côté là. J'essaye vraiment de communiquer avec lui, et même si je suis parfois en désaccord on arrive toujours à trouver le bon compromis !
Quand il est arrivé, on est passé du coq à l'âne sur beaucoup de choses. Il a une culture du badminton dont il faut vraiment s'inspirer, mais ça ne fonctionne pas avec tout le monde ! Au début ça a été compliqué pour certains, d'autres beaucoup moins, je pense qu'il était très carré sur certaines choses qu'il n’était pas près à entendre au début, mais avec le temps il a accepté de faire des compromis et de trouver le juste milieu.
Chacun a mis de l'eau dans son vin, aussi bien les joueurs que les entraîneurs, et aujourd'hui on a trouvé un équilibre intéressant. Il continue à nous apporter quelque chose, et il apprend aussi en tant qu’entraîneur. C'est aussi pour ça qu'il était très carré au début, il avait moins d'expérience derrière lui. Il s'est aussi rendu compte des divergences qu'on peut avoir avec la culture danoise, et il a su s'adapter.
Les JO sont omniprésents dans l'actualité avec ceux de Paris en 2024. Ceux de 2020 sont-ils un objectif pour toi ?
2020 est en effet mon objectif, ce seront sûrement mes derniers jeux. Je suis heureuse que ça se passe à Paris en 2024, mais je serai plutôt dans le public ! Il faut laisser la place aux jeunes, et j'aurai sûrement envie d'autre chose. L'objectif est que je reste encore 3 ans, si c'est possible physiquement et que les résultats continuent. Maintenant j'attends avec impatience Gaëtan (Mittelheisser, nldr) !
Crédit photo : Badmania.fr
"Se maintenir dans le top 40 en double dames"
Et à plus court terme, quels sont tes objectifs ?
Normalement, Gaëtan devrait revenir pour le Scottish Open en Novembre, je pense que ce ne sera pas possible d'être sélectionné aux championnats d'Europe individuels dans la foulée. Par contre, la sélection pour les Championnats du monde se fait en Avril, l'objectif serait déjà de pouvoir y participer, pour qu'il revienne en forme et qu'on monte en régime au fur et à mesure des compétitions. On pourrait essayer de retrouver un classement plutôt correct d'ici fin Juin.
En double dames, l'objectif serait de se maintenir dans le top 40 voire le top 30. Ça va être difficile, car on a beaucoup de hauts et de bas aujourd'hui, mais j'espère que ça va remonter vite. Ensuite, un quart de finale aux championnats d'Europe serai un bel objectif.
A propos de ton équipe du Badminton Club Arras, penses tu que vous êtes condamnés à jouer le maintien ou alors vous pouvez viser mieux que ça ? On a par exemple vu de bonnes choses contre Mulhouse et Aulnay-sous-Bois ...
Je pense qu'un objectif réalisable serait troisième ou quatrième. Se maintenir évidement, mais pas à une place d'avant-dernier, je pense qu'on est capables d'aller chercher un peu plus haut. Il nous manque parfois un peu d'expérience pour le Top 12, comme contre Aulnay (défaite 5-3 ndlr). La rencontre est tendue, les matchs sont très serrés et il faut aller les chercher. Ça s'est bien passé contre Mulhouse, contre Aulnay un peu moins, c’était une équipe plus homogène avec plus d'expérience. La place de troisième serait déjà un super objectif.
Pourtant tu as déjà joué des matchs tendus au cours de ta carrière, arrive tu à mieux gérer la pression au cours des années ?
Gérer je ne sais pas, chaque situation est différente, chaque match est différent et ça dépend de l'enjeu. Il y a quelque années, je les gérais beaucoup moins bien. Mais par équipe c'est plus facile, le public est souvent avec nous et il y a une très bonne ambiance qui me permet de m'en sortir.
Quand tu es sur le terrain, ressens-tu une différence entre les moments où tu joues pour une équipe et ceux où tu joues « pour toi » ?
L'ambiance est différente.J'adore jouer par équipes, il y a quelque chose qui me crée énormément d’émotion sur le terrain et j'adore ça. J'ai toujours mieux joué dans ces cas là, le fait de ne pas jouer que pour moi me libère d'une certaine pression. Je ne me permet pas de faiblir, je me dis "tu n'as pas le choix !"
Pour finir, il y a t-il un joueur ou une joueuse que tu aimes regarder jouer et que tu vas suivre particulièrement aux IFB ?
En simple j'aime bien Lee Hyun-Il, il a une fluidité sur le terrain qui est vraiment intéressante, et en plus il est gaucher comme moi ! En doubles, j'aime bien regarder les Adcock, c'est un jeu européen qui est assez agréable. Je préfère quand même les Danois (Christinna Pedersen et Joachim Nielsen ndlr) mais ils ne joueront pas ensemble cette fois donc je suis un peu déçue, d'autant que j'aime bien le comportement de Fischer sur le terrain.
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