Crédit photo : Badmania.fr
Le point sur les faits
Ce point presse combiné aux enquêtes menées par les autorités japonaises permet de distinguer plus nettement les contours d'un scandale impliquant les deux meilleurs simples hommes nippons de l'histoire.
Les faits concernent une grande partie des membres masculins de l'équipe NTT East (du nom d'une entreprise de télécommunications nippones), avec 6 autres badistes nippons impliqués aux côtés de Tago et Momota. Le petit groupe se rend pour la première fois en Décembre 2014 dans un casino clandestin de Tokyo détenu par un membre influent des Yakuzas, la mafia locale.
Accro aux jeux d'argent, Kenichi Tago entraîne alors pour la première son jeune compatriote Momota dans l'illégalité. L'ex numéro 3 mondial est un habitué des lieux. Pas le jeune joueur d'alors à peine 20 ans, qui suit son mentor de la NBA. Sur une période de 2 ans, Tago a reconnu s'être rendu plus de 60 fois dans deux des établissements détenus par le même propriétaire (avec des pics de fréquentation allant jusqu'à 10 entrées par mois), laissant supposer une accointance avec ce dernier. Momota suit occasionnellement, avec 6 entrées. Et pendant que ce dernier joue ''humblement'' 500 000 Yens (4 000¤ environ) sur la même période, son aîné y dépense la somme astronomique de 10 millions de Yens (80 000 ¤ environ), principalement au Baccarat.
L'affaire est grave : au Japon, les jeux d'argent sont très encadrés (voir quasi-interdits), et les casinos illégaux durement combattus car comptant parmi les principales sources de financement des Yakuzas. Une peine allant jusqu'à 3 ans d'emprisonnement est prévue dans le code pénal nippon pour lutter contre ce type de fléau.
Le couperet tombe lors d'une descente de police dans ces établissements clandestins : lors de leur interrogatoire, les propriétaires des lieux divulguent les noms de leurs clients dont ceux des stars du badminton nippon. Prévenu dans la journée de mercredi, la NBA a immédiatement rapatrié ses deux joueurs du Malaysia Open afin de statuer sur leur sort.
Tago, l'ombre pesante du grand frère
Porté aux nues, puis descendu en flammes par ses supporters, Kenichi Tago joue plus que Momota encore un rôle central dans cette affaire. Celui qui s'était en révélé en 2010 en atteignant à la surprise générale la finale du All England est depuis toujours considéré comme le Bad Boy du badminton japonais. Et les deux dernières années écoulées n'ont fait qu'aggraver ce statut plutôt embarrassant.
Sur le circuit, le manque de discipline du jeune Tago est connu de tous. Pas toujours exemplaire sur son hygiène de vie, fréquemment en surpoids, il développe surtout rapidement une tendance de plus en plus prononcée pour les jeux d'argent. En 2013, puis 2014, il est signalé dans des casinos de Macau (région autonome connue pour ce type d'établissements) à l'occasion du Grand Prix local. La NBA (fédération japonaise) lui adressera alors un premier avertissement, que Tago accepte en promettant d'avoir retenu la leçon.
Régulièrement blessé en 2014 puis 2015, Tago plonge tout au contraire de plus en plus. En parallèle, Kento Momota - tout juste auréolé d'un titre de champion du monde junior -, amorce son entré dans le grand bain des seniors, et intègre l'équipe NTT East de Tago. Le numéro 1 nippon le prend alors sous son aile.
Le mythique coach coréen de la NBA Park Joo-Bong prend conscience du danger trop tard. Après une longue période de blessures au dos que Tago gérera avec peu de professionnalisme, le DTN nippon prend la décision de l'exclure de l'équipe nationale en Octobre 2015. Il déclare alors : "C'est une décision difficile à prendre, mais je ne peux pas prendre le risque de laisser son comportement influencer ses partenaires. [...] son renvoi de l'équipe nationale prouve à tous mes joueurs que rien n'est jamais acquis pour personne."
Mais le mal est fait, comme l'illustre les faits révélés en cette fin de semaine. Dans la culture nippone aux codes bien différents de nos sociétés occidentales, le pouvoir d'influence de personnes considérées comme leurs mentors est bien plus important. Il est ainsi difficile pour un jeune nippon de refuser l'invitation d'un aîné, quelqu'en soit sa nature. De quoi expliquer - partiellement - la présence de Momota dans un casino clandestin en pleine ascension au ranking mondial. Les deux joueurs ont également révélé avoir commencé à fréquenter les casinos hors des frontières japonaises.
Crédit photo : The Star Malaysia
''Peu importe ma punition''
Pointé du doigt à l'issue de cette affaire, Kenichi Tago a eu le courage d'assumer sa responsabilité dans cette affaire face à la presse, prenant à sa charge les agissements de Kento Momota.
"Je sais que les jeux d'argent son interdits, mais je ne pouvais pas résister [..] Et alors même que je savais qu'il se préparait pour les Jeux Olympiques, je ne l'ai pas empêché de fréquenter cet endroit. [...]Ce n'est pas une personne habituée à ce genre d'endroit, et un gros bosseur sur le court.. Le héros déchu est allé jusqu'à qualifier son cadet de "trésor national".
Alors qu'il fondait en larmes au moment de poursuivre, Tago a ajouté "se moquer des sanctions dont je pourrais écoper, et même de savoir si je serais autorisé un jour à rejouer au badminton. Mon seul souhait est que vous donniez une seconde chance à Kento Momota''.
À peine moins ému, ce dernier a pris à son tour la parole la voix tremblante : "Je veux vraiment m'excuser auprès de tous ceux qui m'ont permis de devenir ce que je suis. Je les ai tous trahi et j'en suis profondément, sincèrement désolé."
La NBA statuera sur la situation du numéro 2 mondial dimanche, à l'issue d'une réunion exceptionnelle. Mais les réactions des instances nationales ne sont pas encourageantes quant à une participation de Momota à Rio 2016. À la voix du secrétaire général de la NBA Kinji Zeniya qui déclarait qu'une participation de Momota au Brésil risquait d'être "quasi-impossible", s'est joint celle du ministre des sports Toshiaki Endo, déclarant qu'il s'agissait "d'une trahison de l'esprit olympique. Si les faits venaient à être prouvés, il n'aura aucune chance de représenter le pays aux Jeux Olympiques". Seul Lee Chong Wei a manifesté son soutien à son jeune adversaire, assurant qu'il était persuadé que Momota saurait rebondir de cette épreuve", invoquant aussi "une leçon à retenir pour les jeunes badistes malaisiens".
Un coup dur pour la carrière du jeune prodige de 22 ans semble donc se profiler, bien que Kenichi Tago cherche à endosser la majeure partie de la responsabilité de ses actes. À court terme, une suspension de Momota pourrait aussi vouloir dire une grande difficulté pour le Japon à défendre son titre à la Thomas Cup dans un mois.
Luciole
Le 08/04/2016 Ã 18h10 (0)badman999
Le 09/04/2016 Ã 7h11 (0)Fool Moon
Le 09/04/2016 Ã 8h02 (0)FransV
Le 09/04/2016 à 18h35 (0)Piouuu et ben, heureusement que ça tomba pas sur des chinois cette histoire !!
Et dire qu'il y a carrément une pétition pour que Momota aille aux JO...