INTERNATIONAL : Kento Momota, le retour du banni

Publiée par Benoit Castela le mercredi 15 novembre 2017 à 12:08
Kento Momota
Crédit photo : Badmania.fr

Numéro 2 mondial et déjà doté d'une solide côté de popularité internationale, Kento Momota a brutalement disparu des radars en Avril 2016 suite à son implication dans l'affaire des casinos illégaux au Japon. Prétendant à la médaille olympique, le petit génie de la région de Fukushima a dû se reconstruire loin de la lumière des Super Series. 400 jours de purgatoire, puis 5 mois de compétition mineures plus tard, l'ancien leader de la NBA semble prêt pour un retour aux grandes manoeuvres en 2018.

Fauché en pleine gloire

Kento Momota n’était pas juste l’espoir du simple japonais, il était bien plus que cela. A 21 ans, il venait d’atteindre son meilleur classement en carrière (2ème mondial) et à 6 mois des JO de Rio, il se positionnait comme l'un des seuls capables de faire tomber le trio infernal Chen Long, Lin Dan, Lee Chong Wei. Quelques jours avant la polémique, il éteignait Axelsen en finale de l'India Open, dans une redite de leur duel aux Super Series Finals, avec la même conclusion.

Mais voilà qu’il se retrouve publiquement accusé d’avoir joué occasionnellement dans des casinos illégaux depuis 2014 alors qu’il n’avait que 19 ans. L'affaire fait grand bruit au Japon, où la question des établissements illégaux tenus par les Yakuza est un sujet hautement sensible pour l'opinion publique. Momota est emporté par la marée. Le début d'une année de purgatoire et de disgrâce.

Impensable de ne pas sanctionner durement Momota et ses compagnons de ''crime'' pour la NBA (Nippon Badminton Association), sous peine de perdre l'adhésion de la société. Si Tago était à l’époque le leader de ces virées nocturnes et qu’il a d’ailleurs assumé ses responsabilités (bannissement à vie), la NBA a pourtant puni avec une grande sévérité ses poulains (Nishimoto et Momota). Un retrait total des classements mondiaux pendant 6 mois pour le premier (finaliste des derniers IFB) et 13 mois pour le second.



Retour Momota
Crédit photo : The Star

Adieu la Thomas Cup, mais surtout adieu Rio 2016

Quid de Tokyo 2020 au moment de prendre les sanctions ? Le fédération nippone et le gouvernement voulaient en faire un exemple. Et si Momota sera encore probablement dans la course pour les JO à domicile, il n’était pas question de passer au-dessus de ces erreurs de jeunesse au prétexte de préserver des chances de médaille, que ce soit à la Thomas Cup le mois suivant, mais surtout à Rio l'été venu.

Et pourtant, si la sanction peut paraître très lourde pour Tago, celle pour Momota (durée indéterminée au départ, puis interrompue au printemps) a fait couler de l’encre sur l’archipel japonais : une sanction apparue comme ... trop laxiste au goût de certains dirigeants. Mais l'exemplarité et la bonne attitude d'un Momota qui est resté impliqué dans son projet sportif ont joué en sa faveur, pour lui permettre de débuter son long retour aux affaires.

Kinji Zeniya, directeur exécutif de la NBA, soulignera notamment que "quelque soit la date de levée de suspension, nous aurions eu le droit à des critiques sur sa durée".

Retour gagnant, à partir de rien

Et malgré une opposition certes à sa portée, comment ne pas qualifier son retour de gagnant ? Son retour dans l’anonymat du circuit national nippon lors de l’Open de Saitama, après 13 mois loin des courts, se solde par une victoire finale avec un succès arraché face à Ueda, et une émotion manifeste à l'issue de la rencontre. C’était écrit, l’enfant prodigue devait signer le début de son pardon par un succès. Prouver que la leçon retenue, il pouvait redevenir le patron.

L’attente de son retour sur les courts internationaux sera brève : quelques semaines plus tard, la tournée américaine marque le comeback du banni sur le circuit BWF. Loin de l'équipe nationale (il s'entraîne au sein de son club de NTT East), mais les yeux rivés sur l'avenir.

Premier tournoi et déjà les premiers éclats de la patte gauche japonaise qui va sanctionner les malheureux Jeon Hyeok Jin, Mark Caljouw et Kenta Nishimoto avant de s’incliner en finale face à son compatriote Kanta Tsuneyama, les nerfs lâchant aux portes du titre. Une défaite loin d’être anodine puisque ce sera la seule depuis son retour. Depuis cette finale au Canada Open (Grand Prix), le natif de Fukushima n’a plus perdu un match, se permettant même de dépasser le nombre record de victoires de Srikanth Kidambi (l’Indien est à 38 contre 40 pour le Japonais en 2017).

Ses titres à l’US Open, au Belgian Open, au Czech Open (International Challenge), au Dutch Open (Grand Prix) et enfin au Macau Open (Grand Prix Gold) le week-end dernier parlent d’eux-mêmes : 40 victoires en 41 matchs dont 33 victoires consécutives (série en cours) en 2017 : le retour de Kento Momota est tout simplement une boucherie. Des joueurs d'expérience comme Vittinghus, Zainuddin, et surtout Lee Hyun-Il n'y résistent pas. Le signe d'une montée en puissance qui semble aussi linéaire qu'inarrêtable.

Alors évidemment, il faut relativiser ces résultats, aussi remarquables soient-ils. Les tournois disputés par le Nippon correspondent au troisième niveau international et à l’élite du circuit européen. S’il va très prochainement réintégrer un classement lui permettant de se rapprocher d'une entrée en Super Series, il doit encore prouver qu'il dispose toujours du niveau nécessaire pour contrarier le top 10 mondial.

Et maintenant ?

Actuellement 74ème mondial, Kento Momota va se rapprocher du top 50 lors du prochain classement avec sa victoire au Grand Prix Gold de Macau. Son ascension fulgurante en moins de 6 mois devrait se poursuivre. Le joueur de la NBA va devoir se battre dès aujourd’hui pour réintégrer l’équipe nationale lors des sélections organisées en décembre. Mais ce ne sera que le début d’un long chemin puisqu’ensuite il devra continuer de prendre des points, et espérer a minima retrouver le top 30 mondial pour intégrer les tableaux finaux en Super Series.

Le coach de l'équipe nationale Park Joo-Bong n'a lui pas manqué de rappeler qu'aucun cadeau ne sera fait au retour du petit prince du badminton japonais : " “Il devra participer à un tournoi de sélection en Décembre. À ce jour (en Mai, ndlr), il n'a plus aucun classement mondial. Il va devoir d'abord disputer de plus petits tournois, tout comme Lee Chong Wei l'avait fait (après sa suspension pour dopage) pour remonter dans les rankings pour prétendre à s'aligner sur les grands tournois.".

Le temps presse d'ici la fin d'année. Et pour les joueurs asiatiques, 2018 rime avec deux échéances majeures : les championnats du monde en Chine, et les Jeux Asiatiques en Indonésie, qui pourraient marquer le retour au premier plan du Golden Boy déchu de la province de Fukushima.

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  • Luciole
    Le 15/11/2017 à 14h26 (0)
    Le niveau pour jouer top10, il l'a. Il a atomisé LHI, Vittinghus et Ishan. La vraie question porte plutot sur le top 5 et Axelsen et Kidambi qu'il martyrisait avant son départ.
  • Ivan Cappelli
    Le 15/11/2017 à 14h31 (0)
    C'est contestable tout de même : Vittinghus n'est plus à son meilleur niveau tout comme Zainuddin. Lee Hyun Il ne joue lui pas au même niveau en Super Series qu'en GP Gold !

    Je ne suis pas persuadé qu'à l'instant T, Momota puisse surclasser nettement Chou Tien Chen, Lee CHong Wei, Shi Yuqi, Ng Ka Long (bon, lui OK vu sa forme du moment) ou H.S. Prannoy ...
  • Boumseb
    Le 15/11/2017 à 14h34 (0)
    Il les a atomisé avec une fatigue toute relative et je ne pense pas que Vittinghus était à bloc vu les tournois qui arrivaient après.

    Le top 10 sera sans doute une belle marche quand même vu la densité des tableaux dés les 1er tours.
  • polo26
    Le 15/11/2017 à 14h39 (0)
    J'avoue, mis à part son "faux pas" face à Ueda, il a marché sur tout le monde...je ne dis pas qu'il vas démonter les joueurs du Top10, mais quand il aura le rythme des Supers, il va redevenir très dur à battre même pour les Top5.
    Il risque d'être un épouvantail sur les 1ers tours pour un certain temps!
    H.S: je suis le seul à trouver que Shi Yuqi n'est vraiment pas "digne" d'un top joueur de simple chinois??
  • esbi57
    Le 15/11/2017 à 15h49 (0)
    @polo26 : le problème c'est que ce joueur souffle chaud et le froid. Il peut être super impressionant de tactique et de technique comme il peut être dégueux..
  • YoannD
    Le 15/11/2017 à 16h17 (0)
    Une chose que je ne comprend pas par contre dans son parcourt c'est pourquoi il ne s'est pas inscrit aux IFB ?
    Au vu des personnes qu'il y avait en qualification, il pouvait y rentrer. Surtout qu'il était au Pays-Bas la semaine d'avant donc dans le coin.
    Pareil pour l'open de chine qui se déroule en ce moment. Il était à Macao juste avant, il pouvait tenter les qualifications sur le voyage du retour.
  • polo26
    Le 15/11/2017 à 16h21 (0)
    Comme indiqué dans la news, il ne peut pas participer aux supers series tant que le Japon décide que c'est ainsi!
  • Ivan Cappelli
    Le 15/11/2017 à 16h28 (0)
    YoannD : il n'est pas autorisé à faire les Super Series tant qu'il n'est pas réintégré en équipe nationale ;)
  • HawkEye
    Le 15/11/2017 à 17h47 (0)
    S'il n'est pas réintégré en équipe nationale, il s'agira nécessairement d'une volonté de le tenir à l'écart. Ce ne sont pas les autres joueurs japonais, aussi respectables soient-ils, qui, sur le strict plan sportif, vont faire de l'ombre à un garçon qui, comme on a pu le voir en finale à Macau, combine un smash digne de Kidambi et une défense rappelant le Lee Chong Wei des grandes heures.
  • meistertim
    Le 15/11/2017 à 18h48 (0)
    @HawkEye : Il a un énorme smash mais celui de Kidambi c'est quand même autre chose
  • HawkEye
    Le 15/11/2017 à 20h52 (0)
    @meistertim : Bon, d'accord, je me suis un peu enflammé !...
  • Boumseb
    Le 17/11/2017 à 9h07 (0)
    Retour dans le top 50 en effet, 48ème aujourd'hui !