INTERVIEW : F.Chayet, l'entretien grand format (2/2)

Publiée par Ivan Cappelli le mercredi 14 décembre 2016 à 12:00
Florent Chayet
Crédit photo : FFBaD

Suite et fin de notre entretien grand format avec Florent Chayet, président de la FFBaD. Après avoir évoqué ensemble hier les conditions ayant permis son intronisation en Novembre, le nouvel homme fort du badminton français revient avec nous sur les sujets sensibles du moment. Sans langue de bois, et avec une volonté affirmée de garder sur les rails les projets majeurs entrepris lors de la dernière olympiade.

Retrouvez la première partie de cette interview ICI.

''Une approche plus scientifique pour le nouveau classement''

Le nouveau classement est très contesté : en tant que président mais aussi compétiteur, quel regard portez-vous sur lui ?

"C’est une question compliquée, je suis un petit un peu gêné de vous répondre ! J’ai une opinion bien arrêtée très personnelle. A-t-elle la même valeur maintenant que je suis élu président ?Avant je défendais mon avis, avec mes arguments, mais maintenant je suis comptable de ce qui se passe sur ce sujet.

Cette réforme est aujourd’hui en place. J’ai constaté comme beaucoup, que sa mise en place n’était pas optimale. Je ne suis en effet pas satisfait de la façon dont ce nouveau classement a été mis en place. Pour autant, est-ce que l’on peut bouleverser les choses de nouveau ? Non ! Lors de mon discours, j’ai dit clairement que nos décisions avaient été prises à ce sujet avec un certain amateurisme.

C’est une autocritique, que je fais au nom de la FFBaD. Nous sommes obligés de le reconnaître ! Tant que je serai en fonction, Je veux désormais une approche beaucoup plus scientifique et rigoureuse du classement fédéral, avec une expertise plus appropriée. Nous avons été relativement handicapés par le fait que la simulation informatique demande bien trop de ressources.

Un des gros chantiers sera de complètement réécrire ce programme de simulation, ce qui nous permettrait de les multiplier suffisamment pour arriver à quelque chose de plus fiable. Le nouveau classement dépend de coefficients : il faut juste réussir à les ajuster pour qu’il soit fiable."


On a beaucoup entendu dire – par les CoDeps, certaines ligues, mais aussi par les petits clubs – que la FFBaD s’était trop éloignée de sa base de licenciés ces dernières années. Allez-vous travailler en ce sens ?

"Lors de ma profession de foi sur l’olympiade précédente, j’ai affirmé mon intention d’être le défenseur des petits clubs et des licenciés de base. C’est ce que j’ai essayé de faire. Ma conviction personnelle, c’est qu’une association sportive comme la notre doit fonctionner pour tous ses publics, sans que l’un ne soit considéré au détriment de l’autre.

Nous sommes une fédération olympique. Nous avons un devoir de haut-niveau. Mais ce n’est pas pour ça que nous avons le droit de négliger notre base, qui nous permet d’essayer de faire vivre ce haut-niveau ! On doit lui en être redevable.

Sans porter de jugement sur l’éloignement dont vous parlez – qui est difficile à apprécier –, une de mes premières préoccupations aura été d’écrire aux présidents de ligues pour leur demander de formaliser leurs attentes auprès de la FFBaD, en leur incitant à le faire en concertation avec les comités. J’attends leur retour pour voir s’il y a des sujets qui traversent la totalité des ligues, ou si chacune évoque des demandes spécifiques. On est en période de diagnostic ! C’est une démarche à mes yeux en tout cas indispensable.

Nous avons prévu – ce n’est pas encore arrêté – un petit congrès au mois de Février, en préalable à l’AG d’Avril, qui nous permettrait de réunir toutes les forces vives : salariés, cadres techniques, élus, président de ligues, responsables de commission. Cela nous permettrait de travailler durant tout un week-end sur le cap à fixer pour cette olympiade. Nous sommes comme une nation : obligés de faire des choix, car les moyens financiers ne sont pas extensibles."

Brice L.
Crédit photo : Badmania.fr

"Les athlètes de l'équipe de France ont aussi des devoirs''

Parlons du cas Brice Leverdez. Il est aujourd’hui le fer de lance du bad français, mais une scission semble s’être créée avec l’encadrement national. L’avez-vous appelé? Le faire revenir dans le giron fédéral est-il un objectif ?

"Je ne l’ai pas encore appelé faute de temps, mais ma porte est bien entendu ouverte. Il faut comprendre que je suis confronté – je n’avais ni prévu, ni préparé ma potentielle élection – à une situation ou je prends en route une masse de dossiers et d’urgences très importantes.

Les différends avec Brice ont débuté il y a 2 ans, voire plus, on ne peut sans doute pas considérer que ce soit le point le plus urgent à régler. Je voudrais être très clair sur une chose : sur le fond, comme membre du conseil, j’ai parfaitement approuvé la décision de la FFBaD. Les joueurs qui sont aidés par la fédération, encadrés par la fédération ont un devoir en contrepartie, vis-à-vis de cette dernière. Ils n’ont pas le libre choix total de la façon dont ils conduisent leur vie sportive.

Manifestement, à un moment donné, Brice a refusé une demande de la fédération (sa sélection aux Jeux Européens à Bakou 2015, ndlr). Si certains regrettent la forme employée pour faire passer le message, je soutiens sur ce point précis le fond de cette réaction unanime.

Quand deux partis sont en désaccord, chacun va accuser l’autre, c’est logique. Je ne suis pas certain encore une fois que la forme employée par la Fédération pour faire passer le message ait été optimale. Je comprends qu’on puisse en discuter. Je m’attache toutefois surtout au fond : les athlètes de l’équipe de France ont des devoirs vis à de la fédération, pas que des droits."

Plumy
Crédit photo : Badmania.fr

''Les IFB font partie de notre patrimoine''

Votre arrivée coïncide avec une période de candidature pour le renouvellement des IFB, avec en toile de fond un changement de hiérarchie du circuit Super Series. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre position à ce sujet ?

"La BWF fait en effet évoluer l’organisation de son circuit Super Series. Nous avions le choix soit de monter d’un niveau (en Super Series 700), soit de stagner (Super Series 350). Nous avons décidé d’envoyer une lettre de motivation pour grimper d’un niveau. Pourquoi ? Car le risque financier lié à cette opportunité nous paraît relativement faible, et tout à fait assurable d’une part. D’autre part, si nous ne le faisions pas, nous avons la conviction que nous perdrions une opportunité, et ce pour longtemps.

Le circuit international s’implante : les places qui ne sont pas prises maintenant ne seront pas forcément récupérables plus tard. Il nous semble important que la France marque sa place. Nous pensons que le niveau auquel nous prétendons correspond bien à celui que nous souhaitons occuper pour les années qui viennent. À mes yeux, il s’agit d’un investissement à long terme. Les IFB sont la grande fête du badminton français, un tournoi de qualité mondiale, les gens qui viennent à Coubertin sont tous très enthousiastes. C’est quelque chose que nous devons conserver, car il fait partie de notre patrimoine."

J’aimerais que les licenciés en aient conscience : c’est notre crédibilité institutionnelle, internationale qui en bénéficie. C’est un outil dont nous devons absolument disposer pour accueillir les résultats que nous espérons les plus proches possibles du haut niveau mondial . Nous faisons tout ce qu’il faut pour, mais on a besoin d’un cadre pour que ces résultats puissent s’épanouir.


Une réaction sur le terrible coup dur pour la fédération anglaise ? UK Sport a coupé les vivres au programme de performance du badminton britannique, dont le budget passe de 5 millions de livres au zéro absolu. Un tel scénario pourrait-il se produire en France ?

"Cela ne m’étonne pas spécialement, car les Anglais ont décidé de se concentrer sur le financement des sports ayant des résultats. En tous cas, je ne redoute pas ce scénario en France, car je pense que les résultats ne tarderont pas à venir. Je doute en revanche que les institutions françaises soient si brutales que leurs homologues anglaises. Inutile de crier au loup tant qu’il ne s’est pas manifesté !

Une question plus pertinente serait : considérez-vous que le haut-niveau soit un critière de développement vital pour le badminton français ? Incontestablement, oui ! Le haut niveau progresse. De l’olympiade 2008-2012 à celle de 2012-2016, le badminton français a doublé son nombre de podiums internationaux. Je ne suis pas Madame Soleil, je ne peux pas vous dire quand on aura des joueurs qui réussiront sur les événements majeurs. Mais je suis intimement persuadé que ça ne saurait tarder."

Lire la partie 1 de l'interview de Florent Chayet ICI

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  • Bobodu56
    Le 14/12/2016 à 15h01 (0)
    Je trouve sa vision des choses très intéressante ! Je pense qu'il va faire évoluer le badminton en bas de la pyramide, et que le au niveau va en apprécier l'évolution !
    Cette idée de faire évoluer les codeps et et les ligues tout en continuant à soutenir le très haut niveau est vraiment positive, et j'espère fera grandir notre pratique ! :)
  • kosiric
    Le 15/12/2016 à 14h06 (0)
    Mouaih...

    Au debut, avant d'etre elu, c'est la FFBAD n'ecoute pas etc et maintenant "Sans porter de jugement sur l’éloignement dont vous parlez – qui est difficile à apprécier".

    D'un seul coup, ce n'est plus exactement le meme discours...

    Esperons qu'il tiendra sa ligne de conduite et restera dans la continuite du developpement de notre sport.