Jakarta accueille donc les championnats du monde de badminton 2015, la 3ème édition indonésienne du mythique tournoi dont l'édition annuelle débute ce lundi (10-16 août). L'un des pays berceaux du badminton, sport glorifié grâce à un rendement olympique phénoménal, a connu un passage à vide après les JO de Pékin sur la scène internationale. La descendance de Taufik Hidayat a repris des couleurs depuis 2013 et entend bien enfoncer le clou à domicile dans une arène chauffée à blanc.
Le badminton et l'Indonésie, ou le poids de la tradition
Le qualifier de sport national serait presque un euphémisme : religion semble plus proche de la réalité. Le XXème siècle va installer le badminton au sommet de la hiérarchie des sports les plus populaires du pays. Son essor mondial dans les années 60 s'accompagnera d'une domination presque sans partage de l'Indonésie dans les compétitions internationales par équipes. Le All England, véritable Wimbledon de la discipline, n'échappera lui non plus pas au joug de ce précurseur. Un cercle vertueux est né, celui d'un sport de rue qui produit des champions. Les noms de Hadinata, Hartono, Susanti ou Mainaky vont poser les jalons d'une fierté nationale au cours de décennies suivantes encore dans tous les esprits aujourd'hui.
Ces noms de mythiques joueurs en leur pays peuvent sembler obscurs en occident, malgré, pour certains, une présence toujours d'actualité dans les instances de la PBSI (fédération indonésienne de badminton). Pourtant, la traduction de leurs exploits et ceux de leurs successeurs dans la comptabilité mondiale et olympique du badminton est on ne peut plus limpide. Sur 27 médailles olympiques remportées par le pays tous sports et toutes olympiades confondues, 18 proviennent du badminton. Et ce n'est pas fini : à titre d'exemple, l'archipel devance la Chine en comptant 13 Thomas Cup à son actif ainsi que 9 titres mondiaux en double hommes, sa discipline de la plus prolifique. Qui dit mieux ?
De Pékin à Londres : le grand désert
Puis viendra le cruel déclin de la fin des années 2000. Luttes intestines, indécision et inertie au sein de la PBSI, fédération intimement liée au pouvoir politique, vont considérablement freiner le renouvellement d'un vivier d'élites, et faire fuir les bonnes volontés, nombre d'athlètes prenant régulièrement leurs distances avec l'institution. Faute de pouvoir se réinventer, l'école indonésienne assiste à une raréfaction de ses talents.
En parallèle, les gloires encore présentes sur le circuit sont en fin de cycle. Taufik Hidayat est déjà entré dans la légende. Le point culminant de sa carrière, l'or olympique d'Athènes 2004 et celui des Mondiaux suivants à Anaheim en 2005 font partie du passé. Son baroud d'honneur avec l'argent des Mondiaux de Paris 2010 marquera le début de sa pré-retraite … et la crise de son pays en simple hommes.
Et puis, pourquoi conserver une équipe qui gagne ? Les deux paires médaillées à Pékin avaient de l'allure. Nova Widianto, associé à Liliyana Natsir, est un héros du double avec deux couronnes mondiales en 2005 et 2007. Certes, la finale perdue à Pékin en 2008 face à un garnement coréen, un certain Lee Yong-Dae, lui reste en travers de la gorge. Mais contre toute attente, le duo, encore n°1 mondial en 2010, est destitué par la PBSI, et Widianto envoyé en retraite anticipée.
À l'inverse, Markis Kido et Hendra Setiawan sont médaillés d'or olympique, mais quittent la PBSI l'année suivante dans un conflit retentissant, visant à obtenir leur indépendance du sponsor national. Devenus indépendants, les résultats ne suivent pas. Le double hommes indonésien perd là -aussi brusquement ses repères dans le top 10 mondial ;
Enfin, un monde qui change autour de soi, et c'est l'estocade. Entre l'émergence de la concurrence de nouveaux pays, la renaissance du Japon et de la Corée, mais surtout une locomotive chinoise qui fauche tout sur son passage, le déclin du leadership indonésien vire au fiasco, le pays touche le fond pendant les J. O. britanniques. Tout un symbole : pour la première fois, la délégation nationale rentre à Jakarta les mains vides. Et elle se remet au travail.
Le rebond, place déjà assurée au panthéon pour Natsir et Setiawan
Une seule année. C'est le temps qu'il aura fallu attendre pour qu'Hendra Setiawan le stratège ne retrouve son aura avec son nouveau partenaire, Mohammad Ahsan l'artificier : ils font mouche aux Mondiaux de Guangzhou 2013. Il en aura fallu un peu plus, à peine trois ans, pour que Liliyana Natsir et son padawan Tantowi Ahmad assoient leur autorité sur un évènement d'envergure. La princesse indonésienne s'installe un peu plus dans la légende avec sa troisième breloque de championne du monde. Coup double : l'archipel redore son blason avec deux titres mondiaux, et inflige un camouflet à l'empire du milieu sur ses terres.
Si les héros de Guangzhou ont réussi à se maintenir dans le trio de tête mondial de la discipline depuis leur sacre de 2013 , ils ont du déclarer forfait aux Mondiaux de Copenhague suite aux blessures de Tantowi à la cheville, et celle d'Ahsan au dos. Mais entre pépins de santé et événements familiaux pour Setiawan/Ahsan (tous deux connaissent les joies de la paternité à quelques mois d'intervalle), les titres récoltés 2014 restent flatteurs : All England, du Superseries de Hong-Kong et surtout les prestigieux Jeux d'Asie. Et même si l'inventaire des trophées 2015 demeure vierge pour l'instant, les affrontements avec les concurrents directs au titre mondial, Lee/Yoo ou Fu/Zhang, sont toujours accrochés.
Pour Tantowi Ahmad et sa prestigieuse partenaire, un bilan similaire : les titres du All England, de Singapour et des IFB sont acquis en 2014, celui des Championnats d'Asie en 2015. Bien que plus inconstants que lors de leur montée en puissance qui les mènera au sacre commun, l'atout maître du couple est tout trouvé. Liliyana Natsir fait incontestablement partie du carré de dames magique dominant la discipline avec Zhao Yunlei, Ma Jin, et Christinna Pedersen. Son bonus ? La furie d'un Istora Stadium acquis à sa cause et plein à craquer !
Quels héros pour faire chavirer Jakarta ?
Alors, quel slogan pourrait venir à l'esprit des fans qui vont déferler la semaine prochaine à Jakarta ? Le prolongement, c'est maintenant ! L'espoir de métal jaune lors de ces Mondiaux repose principalement sur les épaules de ces deux équipages stars. Mas pas uniquement.
Postulat osé ou crédible : et si la bonne surprise venait des solistes masculins ? Simon Santoso et Soni Di Kwuncoro, , lieutenants talentueux du grand Taufik, mais aux parcours hachés par les blessures, seront dans les tribunes. Si Dionysus Rumbaka semble au creux de la vague avec une modeste 21ème place mondiale, Tommy Sugiarto espère bien revenir au premier plan. Fringuant n°3 mondial l'année dernière et paré de bronze aux Mondiaux de Copenhague, une blessure au dos début 2015 stoppe le début du conte de fée. Et si sa victoire à l'Open de Russie il y a quinze jours sonnait la révolte du natif de Jakarta ?
Il faut également souligner le bon coup à jouer pour Polii/Maheswari en double dames. Pour Polii, la page sombre des matchs arrangés des J.O. de Londres a été tournée, la prescription est de mise. Mieux  : le cycle vertueux de la reconstruction et de la montée en confiance atteint son apogée l'année dernière, où elles empochent le titre des prestigieux Jeux d'Asie d'Incheon avec un parcours incroyable : elles écartent les trois premières têtes de série, dont Tian Qing et Zhao Yunlei, pour atteindre la première marche du podium.
Si leur palmarès en Superseries et aux Mondiaux reste à écrire, c'est qu'elles trouvent sur leur route les dévoreuses de podium de l'empire du milieu, lors de duels souvent intenses. Les spectateurs présents à Coubertin en octobre dernier pourront en témoigner. Fraîchement revêtues de la couronne du GPG de Taipeï, et avec le dossard de la 5ème paire mondiale, sont-elles prêtes à entrer dans les annales du badminton indonésien à qui il manque une première consécration mondiale en double dames ?
Enfin, il faudra lire en filigrane à Jakarta le duel à distance et à la course au rêve brésilien que se livreront la jeune garde et les paires indonésiennes moins renommées, en double hommes avec des combinaisons très fluctuantes, ou bien en mixte avec la relève incarnée par Widianto/Dili et Jordan/Susanto. L'étincelle qui enflammera l'Istoria Stadium ne se commande pas à l'avance.
Considérer un titre mondial comme un vulgaire lot de consolation relèverait de la gageure. Pour autant, la gloire olympique demeure l'objectif ultime des athlètes indonésiens, et une ode à l'honneur national. Si les tauliers déjà évoqués n'ont pas de raison de trembler pour obtenir leur sésame pour Rio, le terrain de jeu grandeur nature des Mondiaux de Jakarta constituera à leurs yeux la préparation idéale pour marquer des points précieux, les esprits des concurrents, et ajouter une empreinte dans le marbre de la table des légendes indonésiennes.
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Tim31
Le 08/08/2015 à 12h27 (0)bad ô
Le 08/08/2015 à 12h49 (0)Oui, vide intersidéral en simple dames depuis Susan Susanti, ovni qui a exercé une dictature impitoyable sur le simple dames dans les années 90. Wait and see, une perle de sa trempe se cache peut-être chez les jeunes, le top 15 mondial chez les juniors compte 3 Indonésiennes ;)
crepe
Le 08/08/2015 Ã 15h04 (0)Mais sinon en effet, calme plat.
bad ô
Le 08/08/2015 Ã 19h55 (0)Fricore
Le 10/08/2015 Ã 21h51 (0)