Crédit photo : Yonex International
Car au Panthéon des joueurs danois, ce sont bien eux que l’on suspecterait tout naturellement d’avoir été sacrés champions du monde au cours de leurs prolifiques carrières : seule la prise de conscience que ces monstres sacrés ne sont jamais parvenus à décrocher l’or mondial permet de mesurer pleinement le caractère exceptionnel de la performance de Viktor Axelsen à Glasgow.
Néanmoins, dans l’histoire des championnats du monde de badminton, trois solistes masculins ont bel et bien réussi l’exploit de briser l’hégémonie asiatique. Viktor succède ainsi à deux de ses compatriotes : Flemming Delfs et Peter Rasmussen. Retour sur le parcours de ces trois hommes, héros du royaume scandinave à 20 ans d'intervalle.
Flemming Delfs, le père
Et dire qu’il n’aurait jamais dû lever les bras ! Nous sommes le 4 Mai 1977 à Malmö, ville du sud de la Suède. Disqualifié dès le deuxième tour pour n’être pas revenu sur le court dans les cinq minutes imparties entre le deuxième et le troisième set, Flemming Delfs ne doit son maintien dans la compétition qu’au bon vouloir de son adversaire du jour, le Britannique Ray Stevens.
Ce dernier, insatisfait d’une victoire au rabais face au meilleur joueur du moment, tenant du titre du déjà fameux All England, insiste pour disputer la manche décisive que Flemming lui facturera 15-6. Delfs fut également proche de l’élimination le lendemain face au meilleur soliste japonais de l’époque, Kinji Zeniya, devant s’employer pour effacer plusieurs volants de match lors d’un deuxième acte haletant, finalement remporté 17-15. Pour l’anecdote, c’est ce même Kinji Zeniya, aujourd’hui à la tête de la fédération japonaise, qui est à l’origine de la longue suspension controversée de Kento Momota suite à la médiatique affaire des casinos clandestins.
La suite du tournoi, presque anodine, fut de bien meilleure facture pour le Danois, qui écrasa en finale son partenaire d’entraînement Svend Pri (15-5, 15-6). Dès les premiers mondiaux de l'histoire, Delfs pose l'acte fondateur du badminton danois. Mais peu à l'aise dans les conditions de jeu étouffantes de l'Asie, il s'incline dès le second tour lors de la défense de son titre en 1980, à Jakarta.
Crédit photo : Badminton Europe
Peter Rasmussen, le fils
Vingt longues années se sont écoulées depuis le sacre de Delfs. Huit éditions au cours desquelles la Chine et l’Indonésie se sont équitablement partagées l’or. Pourtant, en terre danoise, l’on sent bien que cette année 1997 sera différente. Les chances de briller sont réelles: à Glasgow, quatre joueurs aux maillots marqués de la croix blanche scandinave auront la lourde responsabilité de représenter le Danemark dans la compétition.
Parmi eux, Poul-Erik Høyer Larsen, récent médaillé d’or aux JO d’Atlanta 1996, apparaît comme le mieux placé pour succéder à son illustre aîné ; dans son sillage, l’on trouve Thomas Stuer-Lauridsen, mais dont le niveau décline inexorablement depuis sa médaille de bronze glanée aux JO Barcelone en 1992, Peter Gade, un jeune joueur prometteur de 21 ans encore inconnu du grand public, et enfin Peter Rasmussen, tête de série n°15 du tournoi.
Ce dernier est l’auteur d’un parcours remarquable pour se hisser en finale, laquelle restera dans la postérité. Face au Chinois Sun Jun, tombeur de Gade en quarts de finale et de Høyer Larsen en demi-finale, la lutte, acharnée lors des deux premiers sets, bascule dans l’irréel lors du set décisif : Sun Jun, perclus de crampes, refuse d’abandonner, portant même le score à 10 points à 3 en sa faveur. Puis, soudain, le miracle eut lieu : Rasmussen aligna douze points consécutifs pour s’installer parmi les plus grands.
À l'aube de ses 33 ans, la consécration est aussi inattendue qu'exaltante. Il réussit là où Morten Frost et Poul-Erik Hoyer ont tous échoué, véritable apogée d'une carrière pourtant loin d'être la plus riche en faits d'armes du berceau du badminton européen. Qu'importe: l'histoire ne retient que les vainqueurs !
Viktor Axelsen, l’esprit
Avant que le tournoi n’ait lieu, l’on se disait avec malice que le clin d’½il serait beau. 2017: vingt ans après Rasmussen, quarante après Delfs, avec, en prime, des championnats qui allaient se dérouler à Glasgow ; un alignement des planètes presque trop parfait pour s’autoriser à rêver d’une victoire danoise, d'autant que le forfait de Jan O Jorgensen obligeait les Scandinaves à présenter un groupe rajeuni (Antonsen et Holst s'invitant à leurs premiers mondiaux notamment).
Et puis, au moment de donner son pronostic, avec un sérieux retrouvé, tous soupesaient les chances de victoire de Lee Chong Wei, rappelait l’invincibilité de Chen Long depuis 2014 lorsque arrivent les grandes échéances, ou encore s’interrogeait sur le niveau que déciderait d’afficher Lin Dan. Viktor Axelsen ? Trop jeune. Mental trop friable. Certes un excellent joueur, mais pas encore de l’acabit d’un champion du monde.
Personne n'avait prédit que le scénario était écrit d’avance : après l’acte fondateur de Delfs, la surprise Rasmussen, c’était au prodige d’Odense que revenait la tâche de gagner, ce qu’il fit de fort belle manière. Comme ses glorieux aînés, son parcours héroïque reste marqué par sa capacité à surpasser la force de frappe collective chinoise sur une compétition. Quel meilleur moyen d'affirmer sa prise de pouvoir que d'écraser Chen Long et Lin Dan sur son chemin vers les sommets .
Désormais, à seulement vingt-trois ans, Axelsen a toutes les cartes en main pour se démarquer de ses prédécesseurs et tenter de se construire le plus grand palmarès du badminton danois et européen. Et pourquoi pas de devenir le premier européen à réussir à doubler la mise au panthéon des meilleurs solistes de la planète.
L'actualité des championnats du monde de badminton 2017 ICI
fab(ad)
Le 30/08/2017 à 14h42 (0)Vous devriez faire ça plus souvent!!
HawkEye
Le 06/09/2017 Ã 21h04 (0)