Le Badminton danois semble se diriger vers l'une des plus graves crises de son histoire. Selon plusieurs sources proches du dossier, Mathias Boe, Carsten Mogensen, Joachim Fischer, Christinna Pedersen et Kamilla Rytter-Juhl auraient tous les cinq mis fin à leur partenariat avec Badminton Denmark (la Fédération nationale). En cause : un conflit ubuesque entre un partenaire fédéral et un sponsor individuel des cinq athlètes, qui pourrait mettre à mal les ambitions olympiques scandinaves.

Une histoire de ... cookies

Tout commence début 2015. L'entreprise Danisa, basée à Copenhague et spécialisée dans la fabrication de cookies et autres gâteaux, décide de renforcer son partenariat avec l'équipe nationale danoise. Son engagement financier lui ouvre le titre de partenaire maillot, lui permettant d'apparaître en grand sur l'avant des tenues des champions danois tels que Jan O Jorgensen ou Viktor Axelsen. Les joueurs arborent pour la première fois ce nouveau logo lors du All England 2015.

Mais la situation tourne au vinaigre lorsque certains joueurs majeurs de Badminton Denmark refusent d'arborer le nom de Danisa sur leur tenue. Raison invoquée : les badistes en question sont déjà sponsorisés à titre personnel par ... un concurrent danois de cette entreprise, nommé Kjeldsens ! C'est avec le logo de cette entreprise sur le torse que Boe/Mogensen remportent en Mars le prestigieux tournoi britannique.

Une situation précaire, qui se tend encore davantage en Avril avec l'approche de la Sudirman Cup 2015. Le contrat individuel des cinq joueurs les interdit de jouer la compétition en représentant une entreprise concurrente, mais Danisa est partenaire titre de la tenue de l'équipe nationale. La fédération refuse tout compromis. Le clash devient alors inévitable.

Out pour la Sudirman Cup ... et après ?

C'est dans ce climat délétère que Boe, Mogensen, Fischer, Pedersen et Rytter-Juhl auraient refusé leur sélection pour la Sudirman Cup 2015. Une position qui n'a pas laissé d'autre choix à René Toft, président de Badminton Denmark, de renvoyer les joueurs de l'équipe nationale scandinave. "Pour rester performant au plus haut niveau mondial, la fédération a besoin d'argent, qui nous est aujourd'hui par Danisa et d'autres sponsors" explique-t-il au média national "Denmarks Radio" (DR).

Selon les joueurs qui se sont depuis exprimés sur les réseaux sociaux, les cinq protagonistes auraient proposé de multiples solutions à leur fédération - jouer sans aucun sponsor, participer gratuitement à certains événements, et même 7 000 $ ! - pour disputer tout de même la Sudirman Cup.

Des arguments qui ont laissé de marbre les dirigeants danois : "Les joueurs ont signé une convention collective signifiant qu'aucun sponsoring individuel ne pouvait prévaloir sur les intérêts de l'équipe nationale. [...] Les joueurs n'ayant pas souhaité remettre les choses dans l'ordre, nous avons malheureusement été contraints de mettre fin à notre collaboration."

À 15 jours du début de la course à la qualification olympique, c'est un terrible coup de massue pour les athlètes comme la fédération. Côté joueurs, il va falloir maintenant trouver un point de chute pour continuer à s'entraîner à haut-niveau, hors du cocon fédéral. Une gageure lorsque l'on parcourt le monde - et notamment l'Asie - en quête de points au ranking BWF. La Fédération danoise étant seule décideuse quant au nom des joueurs et joueuses inscrits aux Jeux Olympiques, une non-résolution du conflit signifierait probablement la fin de toute ambition pour Rio 2016.

Côté fédéral, outre l'impact néfaste sur l'image de l'organisation, les conséquences sont évidemment sportives. L'équipe scandinave, médaillé de bronze lors de la dernière Sudirman Cup, se présentera en Chine diminuée le mois prochain. Et si les joueurs persistent dans leur opposition, le pays phare du badminton européen se priverait de deux à trois sérieuses chances de médaille pour Rio 2016. À Londres, en 2012, le Danemark avait remporté une médaille d'argent et une médaille de bronze, respectivement par ... Boe/Mogensen et Fischer/Pedersen.